L’Histoire d’Hasköy débute avec la construction
de la
mosquée de la Sultane-Mère (Yeni camii) à
Eminönü au tournant des XVIe et XVIIe
siècles. Jusque là, une communauté
juive karaïte vivait aux abords du
sanctuaire qui allait être érigé sur les
remparts byzantins, près de la porte Hébraïca.
La communauté fut dédommagée et des terres lui
fut accordée sur la rive nord de la
Corne d’Or, dans une zone encore vierge,
après les chantiers navals.

Vue de la Corne d'Or
Le
nouveau village de Hasköy (écrit Hasskeuy
pendant la période ottomane), devait prendre un
essor assez rapide et une communauté séfarade
s’y installera également, pour devenir
majoritaire dans le courant du XVIIIe siècle.
Comme dans tous les quartiers de la ville et les
villages des alentours, des musulmans et des
chrétiens y vivaient également.

Vue de la
Corne d'Or depuis
Eyüp
Au centre, les dépôts de munition et Hasköy
à l'arrière. Au loin
le vieux Stamboul
avec la mosquée de
Soliman le Magnifique et
Sainte-Sophie
Les
Juifs seront majoritaires jusque dans les années
1930-1940, puis la migration intérieure vers
d’autres quartiers (Nişantaşı,
Osmanbey,
Pangaltı,
Şişli, Mecidiyeköy, Levent, Ulus),
laissa la place à de nouveaux migrants venus
d’Anatolie et exclusivement musulmans. A la
création de l’Etat d’Israël (1948), les Juifs de
Turquie vont s’y rendre en masse, ce qui va
encore faire chuter leur nombre dans le quartier
de Hasköy pour devenir insignifiant à partir des
années 1960-1970.

La caserne de Mühendishane-i Berri Hümayun,
Halıcıoğlu, 1899
En
1922, selon le plan officiel de la ville, cinq
synagogues sont indiquées ainsi que trois
mosquées, un tekke de derviches, et trois
églises (orthodoxe, grégorienne, protestante).
De nos jours seules deux synagogues sont en
fonction, dont celle des Caraïtes, tandis que
l’église arménienne Saint-Stéphane avec son
école Kalfayan et sa chapelle Ste Marie ont été
rasés lors de la construction du 1er
périphérique. Le temple protestant de Halıcıoğlu
et l’église orthodoxe sont encore en fonction.
Le caractère juif d’Hasköy a totalement disparu
de nos jours et il est même rare d’en voir des
traces en parcourant les rues dont les anciennes
maisons en bois ont fait place à des immeubles
modernes en béton et sans âme. L’ancienne école
de l’Alliance Israélite Universelle a été
transformée en maison de retraite qui loge une
cinquantaine de pensionnaires. Certaines
anciennes synagogues sont en voie de
réhabilitation, comme la Mayor sinagogu, qui
devrait devenir un centre culturel. Une autre a
été transformée en restaurant.

Les abattoirs vers 1920 |

Les abattoirs vers 1940 |

Orphelinat arménien
Kalfayan et la chapelle Ste Marie
(Surp
Asdvadzadzin Şapeli)
juste avant leur destruction
en 1972
même temps que l'église St Stéphane
(Surp İstepanos) |

Les dépendances de la
maison de retraite(avangardiste)
ottomane Darülaceze ouverte en
1896.
Les architectes étaient Yanko Bey
et Vasilaki Efendi - Okmeydanı |

Dans les rues de Hasköy
- 1951
|

Club Sportif de Hasköy -
1952 |

Réclame d'une fabrique de
savons - Halıcıoğlu |

Cinéma des années 1950 -
Halıcıoğlu |

Impressionnante vue du cimetière
juif
C’est
le grand cimetière
du haut de la colline
de Hasköy, traversé par le 1er
périphérique, qui donne une idée sur l’ampleur
de la communauté juive d’autrefois, bien qu’il
ait perdu la moitié de ses dimensions d’origine.
Le périphérique a fait de gros ravages en le
traversant et d’autres portions ont été
grignotées par des gens de condition modeste qui
ont construit des masures tout autour en
utilisant parfois les pierres tombales. Avec le
temps, les baraques sont devenues des immeubles
de cinq étages avec des rues pour y accéder. Une
grosse mosquée est même venue coiffer la colline
avec de hauts minarets. Même la municipalité s’y
est aménagée un entrepôt pour ranger les
machines de chantier.
Depuis quelques années, la communauté séfarade
et la
communauté caraïte, ont pris des mesures
en érigeant un mur d’enceinte. Il était temps.
Le cimetière séfarade, qui est le plus vaste, a
une petite partie de l’autre côté du
périphérique où se trouve le mausolée d’Abraham
(Avram) Camondo, en piteux état. Celui qui a
tant œuvré pour sa ville mériterait une
meilleure attention, que cela soit de la part de
la communauté juive ou de la part de la
municipalité. La parcelle est prolongée au sud
par un petit cimetière arménien grégorien.

Vue
du mausolée Camondo vers 1940 au lieu-dit
Bademlik
Si la partie séfarade n’est pratiquement plus
utilisée et que la plupart des tombes sont du
XVIIIe et début du XIXe siècle, il n’en est pas
de même pour la partie caraïte qui demeure le
seul cimetière de cette communauté à Istanbul.
Le cimetière musulman (Kulaksiz) se trouve un
peu plus éloigné, sur un autre versant de la
colline, entre Aynalıkavak et
Kasımpaşa.
Jusqu'à la fin du XIXe siècle, Hasköy était la
dernière zone urbanisée sur la rive nord
de la
Corne d’Or. Quelques constructions s’étendaient
au bord de l’eau du côté de Sütlüce et
Halıcıoğlu et, plus loin, quelques demeures
bourgeoises et un palais impérial se tenaient au
fond de la vallée qu’on appelait à l’époque, les
Eaux Douces d’Europe.
Sur la colline, il n’y avait rien au-delà du
cimetière juif, sauf quelques couvents de
derviches qui parsemaient la campagne et dans la
dernière décennie du XIXe siècle, apparurent
l’hôpital bulgare et un ensemble de pavillons
destinés aux personnes âgées. Ces bâtiments
étaient les premiers dans l’Empire ottoman, qui
n’étaient pas destinés à des usagers d’une
communauté particulière, mais simplement à des
ressortissants ottomans, quelque soit leur
religion. L’Etat avait prévu ainsi différents
lieux de culte : musulman, chrétien et juif.
L’ensemble fonctionne encore de nos jours (Darülaceze).

Madam
Viktorya Esteriya
Zarkon
fête son centenaire au home
d'Hasköy
(Ihtiyarlar Yurdu),
ancienne école de
l'Alliance
Israélite Universelle,
ouvert en
1962
|

A droite, mur de la
synagogue Mayor qui doit être
transformée en
centre culturel d'après
le président de la communauté d'Hasköy,
Moiz Behar |

Entrée du cimetière
caraïte |

Rabin de la communauté
caraïte |

Ancienne synagogue
transformée en restaurant.
Le kitch est
à l'honneur...
|

Eglise de la communauté
roumaine, Aya Paraskevi |
Ce n’est qu’après 1960 que la ville a pris des
proportions gigantesques et naturellement Hasköy
s’est vu noyé dans le tissu urbain. Le quartier
a été délaissé par les autorités pendant
longtemps, mais il faut avouer que ces dernières
années, des efforts ont été accomplis et le lieu
est nettement plus présentable.
Dans les années 1980, ont avait déjà nettoyé des
anciennes usines les bords de la Corne d’Or, à
coup de bulldozer. Dans l’élan, on s’est aussi
débarrassé de bâtiments historiques, sans en
faire de cas. Les jardins publics aux airs
staliniens ne donnaient pas envie de faire une
étape à Hasköy.

Corne d'Or vue aérienne depuis Eyüp
Tout cela a bien changé et un aménagement plus
harmonieux des jardins a été entrepris en les
ponctuant d’îlots fleuris et d’aires de jeux
pour les enfants.
Les locaux des anciens abattoirs de Sütlüce ont
été récupérés pour en faire un centre des
congrès (Halıç Kongre Merkezi) et des hôtels ont
été construits à proximité.
L’immense
musée (privé) de l’Industrie Koç,
donne un véritable motif de se rendre à Hasköy,
ce que font des milliers de Stambouliotes et de
voyageurs. C’est le plus beau et le plus vaste
musée que l’on puisse voir sur la Corne d’Or.
Fermé pendant plus de dix ans,
le palais des
Glaces (Aynalıkavak)
qui est coincé entre Hasköy
et les chantiers navals et à de nouveau ouvert
au public. De beaux jardins entourent cette
bâtisse du XIXe siècle, tandis qu’un étage est
consacré au musée de la Musique ottomane.
Les chantiers navals qui couvrent tout le reste
de la côte nord jusqu'à l’hôpital de la Marine à
Kasımpaşa risquent fort de disparaître dans un
avenir proche. Le gouvernement et la Grande
Municipalité d’Istanbul cherchent à faire
aboutir un projet mégalomane, dont le point
central serait un centre commercial. Les
opposions viennent de partout, mais ce genre de
chose n’a pas l’habitude de déstabiliser les
autorités.
Il reste bien du travail à faire pour qu’Hasköy
et les alentours deviennent vraiment agréables,
mais au train où évoluent les choses, on peut
quand même se réjouir de l’assainissement des
ses quartiers proches du centre, si longtemps
oubliés par les autorités et les gens des beaux
quartiers.
|

Le pont du 1er
périphérique et le cimetière
arménien au fond |
Le couvent des Archers impériaux |
|
Bien au-delà du cimetière juif,
perdu au milieu des pâturages,
le tekke
Okçular
(couvent
des Archers)
étaient un centre religieux
important pendant la période
ottomane,
qui
à
donné le nom a l'actuel quartier d'Okmeydanı. La République ne
toléra pas les sectes
musulmanes, et en 1925, la
quasi-totalité des couvents
durent fermer leurs portes.
Abandonné, le tekke tomba en
ruines et failli complètement
disparaître. Il ne restait plus
trace de la mosquée et
des
bâtiments annexes, seuls le
minaret et une partie d’une
bâtisse
sont parvenus jusqu'à
nous.
|

Etat des lieux
au commencement des travaux |

Le restes des
bâtiments d'origine |

Nouvelle
construction |

Au final |
Les autorités (AKP) ont décidé
de « restaurer » l’ensemble...
C’est-à-dire de reconstruire un
couvent avec les bâtiments
annexes, mosquée comprise, comme
ils existaient il y a cent ans.
On créa une fondation portant le
nom de l’ancien tekke qui a pour
but la promotion du sport (!) et
naturellement de la religion.
L’ancien terrain des archers
impériaux a aussi été réaménagé
pour les tireurs à l’arc. Ainsi,
les autorités continuent
mordicus, dans la voie qu’ils se
sont tracés : la reconstruction
de l’Empire ottoman !
|
|
Carte de Turquie
/
Plan du métro

Description des principaux quartiers figurant
sur cette carte :
Eyüp (Eyoub),
Fener
(Phanariot Quarter),
Hippodrome,
Corne d'Or (Chrysokeras),
Kasımpaşa (Kassim Pasha),
Kurtuluş (St. Dimitri),
Dolapdere (Yeni Shehr),
Péra,
Galata,
Tophane,
Fındıklı (Fundoukli),
Beşiktaş (Beshicktash),
Üsküdar (Skutari),
Kadıköy (Kadikeui),
Sarayburnu (Acropolis of the Greek Byzantium)
Visites insolites privées
à
la carte :

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