Les Maurisques
Il s’agit des derniers descendants de ces populations musulmanes espagnoles, que
les chrétiens appelaient « Maures », épargnés par la Reconquête au XVIème siècle
et qui se sont maintenues dans la région de Grenade. En 1492, à l’instigation
d’Isabelle d’Espagne, ils perdent toute liberté religieuse. L’ultimatum était
clair : la conversion où l’exil. Un grand nombre sera baptisé de force, mais
tout comme les Marranes, les Maurisques continueront à pratiquer leur religion
dans l’ombre.
Comme dans tous les pays que les Arabes ont conquit, la population d’origine de
la péninsule espagnole, restait largement majoritaire sous la domination
musulmane. Le christianisme n’avait pas disparut et pouvait continuer à se
pratiquer librement, tout comme le judaïsme, fort répandu. Une lente
assimilation des populations converties à l’islam était bien en cours lors de la
Reconquête, mais était loin d’être achevée. Ainsi, l’Espagne redevenue sous
pouvoir catholique, expulsa bien des Espagnols musulmans et non des
‘envahisseurs’ arabes.
On peut imaginer que la région de Grenade, comptait au moins 1/4 de Maurisques
dans sa population, après l’expulsion des juifs et des musulmans.
Le soulèvement de Grenade
Un demi-siècle plus tard, la région s’enflammera et les Maurisques se
soulèveront contre le pourvoir catholique. En 1568, ils se donnent un roi : Aben
Humeya et s’engagent dans un conflit violent, dans les montagnes de l’Alpurajar.
Le roi d’Espagne réagit violemment et envoi ses troupes disponibles pour mater
la rébellion, alors que le pays est déjà engagé contre une révolte aux Pays-Bas
espagnols, La guerre durera deux ans.
Les Maurisques sont aidés financièrement par le sultan Selim II et son banquier
le duc de Naxos, Josef Nasi. Ils espérèrent également une aide matérielle afin
de vaincre définitivement Isabelle-la-Catholique et récupérer la région de
Grenade.
Le grand vizir Sokullu Mehmet Pacha, mettra du temps à convaincre le sultan
méfiant, à faire intervenir la flotte ottomane. Selon Sokullu, un débarquement
en Espagne était souhaitable afin de déstabiliser les Habsbourg, en les
attaquant, non comme d’habitude, par le nord (la Hongrie), mais par le sud, dont
la présence militaire était plus faible. Les bonnes relations qu’entretenaient
l’Empire et la France, permettaient à l’armada ottomane, de débarquer à Toulon
afin d’y passer l’hiver. Le roi de France, endetté auprès des banquiers du
sultan (des Marranes chassés du Portugal), allait fournir le ravitaillement de
l’armée ottomane afin de rembourser sa dette. L’attaque de l’Espagne devait
avoir lieu au printemps 1571, mais l’insurrection maurisque échoua et les
rebelles seront définitivement battus par Juan d’Autriche en novembre 1570.
La fin des Maurisques
Les Maurisques furent massacrés ou durent quitter la région de Grenade
précipitamment. Une partie trouva refuge dans l’Empire ottoman, soit dans la
région d’Alger, soit à Istanbul.
Dans la capitale ottomane, les réfugiés sont installés dans le faubourg latin de
Galata, où vit déjà une communauté
juive, elle aussi chassée d’Espagne. On assiste à un regroupement non religieux,
mais linguistique, comme ce fut le cas plus tard, pour les juifs chassés
d’Allemagne et rassemblés à Istanbul autour de la communauté autrichienne.
C’est entre la porte Saint-Antoine et l’église Saint-Dominique, reconvertie en
mosquée « des Arabes » , que les
Maurisques pourront dorénavant, vivre leur foi en toute liberté.
Aujourd’hui à Istanbul, il ne reste plus trace des Maurisques. Ces Espagnols
musulmans, se sont complètement dilués dans d’autres groupes ethniques de même
religion, des Turcs, des
Albanais ou des Slaves.

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